D’après les données de Food Service Vision, société de conseil spécialisée dans la restauration hors domicile, d’ici 2024, la livraison à domicile pourrait représenter 19% du chiffre d’affaires de la restauration commerciale en France, soit près de 10,3 milliards d’euros.
La pandémie de Covid-19 a en effet accéléré certains des mouvements qui sont déjà à l’œuvre : ces derniers mois, les Français ont plus que jamais réclamé la livraison de nourriture, notamment dans les grandes villes. De ce fait, il a augmenté de plus de 47 % en France entre 2018 et 2020. Désormais, 7 commandes sur 10 sont passées via des plateformes de livraison comme Uber Eats, Deliveroo ou Just Eat.
C’est dans ce contexte-là qu’un nouveau phénomène est apparu en France : les “dark kitchen”, ou “cuisine fantômes”. On en compte un peu plus de 400 en France, surtout à Paris mais également à Bordeaux, Marseille, Lyon ou encore Lille.
La naissance du concept de Dark Kitchen
Ce concept est né il y a 10 ans, à Chicago. Les plateformes de livraison (Uber Eat, Deliveroo, etc.) ont constaté une augmentation des livraisons de repas à domicile dans des zones résidentielles dépourvues de restaurants. C’est là que les premières dark kitchen se sont implantées. Une cuisine fantôme, c’est donc un restaurant qui ne possède pas de salle et qui est donc conçu uniquement pour la préparation de plats dédiés à la livraison.
La startup française Not So Dark s’est lancée dans cette activité il y a quelques mois et possède déjà 9 dark kitchen tout en réalisant un chiffre d’affaires de 2 millions d’euros par mois. Cette startup s’occupe de créer les sites de production, les dark kitchen, dans des grandes villes et à proximité des quartiers résidentiels. Ces locaux font entre 400 et 1000 m², et sont optimisés pour réduire le temps de fabrication des plats. Not So Dark collabore évidemment avec Deliveroo et Uber Eats, qui s’occupent de livrer ces plats cuisinés dans les dark kitchen. Cependant, les commissions prises par les plateformes de livraison ne sont pas les mêmes que pour des restaurants traditionnels (habituellement entre 25 et 30% du montant de la commande).
Le fonctionnement des Dark Kitchen
En plus d’aménager les lieux de productions, Not so Dark s’occupe de créer des marques virtuelles. La startup s’occupe d’identifier les tendances du moment et les plats qui pourraient être populaires en France: « Quand il y a un potentiel, on crée une marque virtuelle pensée pour la livraison ». Les recettes sont ensuite élaborées avec des chefs, et pour trouver le nom, le logo de la marque, ainsi que pour imaginer l’emballage des plats, la startup fait appel à une agence de marketing.
Quant à la qualité de ces plats, le fondateur de Not so Dark affirme qu’ils sont tout aussi bons que ceux préparés par des restaurants traditionnels. Stéphane Méjanès, journaliste gastronomique, n’est pas du même avis : selon lui, les plats préparés dans des dark kitchen sont de qualité médiocre et relèvent même de la malbouffe.
On pourrait penser que ces plats sont moins chers que ceux préparés dans des cuisines traditionnelles, cependant ce n’est pas forcément le cas : en comparant le prix d’un menu avec un burger, des frites et une boisson, on obtient un prix de 18.28 euros chez Burger King, 19.20 euros avec McDonald’s ou encore 22.20 euros chez Big Fernand. Quant à JFK, une marque créée par Not So Dark, la même formule revient à 23.59 euros.
Une menace pour les restaurants ?
Les restaurateurs sont en droit de se demander si ces dark kitchen sont une menace pour eux. Tant pour le fondateur de Food Service Vision que pour le fondateur de Not so Dark, il n’y a pas de concurrence frontale. La livraison à domicile via Deliveroo ou Uber Eat et le fait de se déplacer dans un restaurant pour y dîner sont deux services distincts. D’après le fondateur de Food Service Vision, les seuls restaurateurs qui pourraient se sentir menacées sont ceux dont l’accueil, la qualité des plats ou l’expérience sur place ne sont pas à la hauteur.
S’agit-il d’une aubaine provoquée par la pandémie ou d’une réelle tendance ? « La crise et le confinement accélèrent l’intérêt de ce type d’entreprise. Ce mode de consommation devrait en effet s’installer comme une véritable troisième voie, les Français vont garder l’habitude de se faire livrer », a expliqué François Blouin de chez Food Service Vision. Par conséquent, même si les restaurants rouvrent, le marché des dark kitchen devrait continuer à se développer.
Solène S.
Dark Kitchen, les cuisines de l’ombre destinées aux applications de livraison à domicile : https://www.youtube.com/watch?v=gvrm6aCO-Xk&ab_channel=France3Hauts-de-France
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